Quelques infos, rappels et nouvelles et l'interview de Criss parue dans le journal Sud-Ouest en janvier 2011 au sujet de la création FEVER au TNT.
Infos ateliers :
Mercredi 20 et Jeudi 21 avril cours de rattrapage, impro et textes
Mardi 26 avril : Dernier Inter-Atelier de l'année (12 bis rue St Jean)
Présentation Atelier Laboratoire Autour de Gilles Deleuze : dimanche 19 juin à 17 h (Théâtre de Verre)
Présentation Atelier Textes (2ème) : Théâtre des Deux Rêves à 20 h (5, passage de Thionville 19 ème, Métro Laumière ou Crimée)
Festival Rencontres de la Nuit 7 ème édition : 17 au 20 mai 2011
Exposition-Installation : En route vers les cabanes de Juliette Thomas, mairie du 17 ème du 17 mai au 20 mai (hall de la Mairie-
Repas de fin d'année : vendredi 20 mai .
A suivre un peu de lecture, interview de Criss
A très vite
Mc
Interview de Christine Faure Metteur en Scène
Comment vous présenter ? Quel a été votre parcours ?
« Enfant de Harki » d’après le texte de Dalila Kerchouche été ma deuxième mise en scène pour la Compagnie bordelaise « Acteurs du Monde ». Il s’agissait de travailler sur une écriture journalistique dénonçant les conditions d’accueil et l’enfermement des harkis et de leurs familles dans le camp de Bias. C’est la première fois que nous abordions le théâtre documentaire. La notion de territoire (tout comme FEVER avec Bordeaux) a été très importante pour Dalila qui avait vécu dans le camp de Bias dans le Lot-et-Garonne, et elle est très importante pour moi, je suis originaire de Cenon. En ce qui nous concerne, nous avons crée le spectacle « Enfant de Harki » au Théâtre Georges Leygue à Villeneuve sur Lot, il a été vu à Blaye, pour les Chantiers et ensuite à la Cartoucherie de Vincennes à l’invitation de Ariane Mnouchkine.
Mon équipe est sensiblement la même pour FEVER que lors de la 1ère mise en scène pour Acteurs du Monde « Hamlet-Machine » de Heiner Muller et j’aime la notion de troupe. Cyril Passadori, et Marie Christine Aury mais aussi Karina Ketz m’accompagnent dans cette aventure commencée plus tôt à Paris avec pour moi le même désir de recherche autour de la mémoire collective et de la mémoire individuelle.
Ce travail aussi de la transmission et du partage, je souhaite le réinterroger en associant cette fois à l’Histoire, une écriture plus littéraire à laquelle je suis très sensible, celle de FEVER, de Leslie Kaplan. Je suis aussi directrice artistique d’un festival autour des écritures contemporaines à Paris, « Les Rencontres de la Nuit » et je dirige plusieurs ateliers amateurs.
Vous avez rencontré la romancière Leslie Kaplan en 2007, puis vous avez mené un atelier laboratoire autour de ses œuvres. À quoi avez-vous êtes sensible ?
J’ai eu la chance de découvrir l’écriture de Leslie plus jeune, grâce à une interview de Marguerite Duras, dans « L’Autre Journal et depuis « L’excès-l’usine », elle a toujours été une compagne littéraire précieuse. Leslie projette le réel dans notre vie comme une suite poétique, musicale et qui engage la pensée. Son écriture résonne longtemps après lecture. Elle ouvre d’autres champs de langage et d’écriture.
Fever, le roman, traite du déterminisme comme du hasard, emprunte à Raskolnikov comme aux théories de Hannah Arendt, évoque le procès Papon… Comment travaille-t-on une telle matière, lourde de sens et de symbolique ?
J’essaie de faire toute la place à l’écriture de Leslie, qui invite au débat et soulève le langage pour laisser circuler librement le rythme, la poésie, la respiration. Je voudrais aussi citer un passage de Hannah Arendt : « Car la leçon de ces histoires est simple et à la portée de tous. Politiquement parlant, elle est que dans des conditions de terreur la plupart des gens s’inclineront mais certains ne s’inclineront pas. De même la leçon que nous donnent les pays où l’on a envisagé la solution finale est que « Cela a pu arriver » dans la plupart d’entre eux mais que cela n’est pas arrivé partout. Humainement parlant il n’en faut pas plus et l’on ne peut raisonnablement pas en demander plus pour que cette planète reste habitable pour l’humanité.
La représentation du mal irrigue l’art depuis toujours et le théâtre n’y échappe pas. Au jeu des correspondances, à quelles figures avez-vous songé ?
Fever mêle fiction et histoire collective, donc d’évènements réels et dont certains se sont passés à Bordeaux et là il m’est difficile d’établir des correspondances si ce n’est déjà dans le monde contemporain dans lequel je vis.
Il est également question de transmission puisque les deux protagonistes sont élèves de terminale et suivent avec passion les cours de philosophie. Cette notion-là et plus encore, ce dont chaque être hérite vous concerne-t-elle ?
« Qu’est-ce que je fais de ce qu’on a fait de moi » dit Thomas, un des personnages de FEVER. Oui j’ai choisi FEVER aussi pour la question de la transmission et de la question de ce qui s’élabore à partir de ce qui nous empreinte. Dans le roman plusieurs générations sont présentes, plusieurs époques aussi, tout cela fait écho sur ma propre vie, et je suis certaine que s’il n’y a pas un travail pour interroger l’Histoire et sa propre histoire, la philosophie pour analyser, comprendre le quotidien de nos vies, les mêmes choses sont appelées à se reproduire avec nos enfants, notre entourage, comme de lourds secrets ; rien de nos vies n’arrive par hasard. « Si on ne connaît pas son histoire, nous sommes condamnés à la revivre » comme l’expliquait Goethe.
Lors de la préparation de votre adaptation, votre compagnie (Acteurs du monde) a travaillé avec des collégiens et des lycéens. Cela relevait-il de l’évidence à l’aune du sujet ?
Nous travaillons avec des collégiens et des lycéens autour de FEVER. Nous avons relié dans ce travail des lecteurs de la Ligue de l’Enseignement, une chorale. Nous n’avons rien inventé. Il suffit de rejoindre la musicalité de Leslie et sa dramaturgie qui associe plusieurs générations et nous avons le fil rouge. Nous avons travaillé autour de la lecture à voix haute car avec Marie Christine Aury, comédienne, nous sommes très engagées sur le passage de l’écriture à la lecture, de la lecture à l’oralité. Chacun sur ce projet a pu se saisir des mots, de la langue de Leslie, de ce partage et témoigner de son désir de transmettre à son tour, quelque soit son âge. Chacun a pu travailler sur le texte de Leslie « Qu’est-ce qu’un homme libre » et il est entré simplement dans un désir de partage avec des acteurs très impliqués tels Magali Fourgnaud et Nicolas Villeneuve au Colllège Chambéry de Villenave d’Ornon ou Cathy Piet de la Ligue de l’Enseignement. Nous présenterons un travail spécifique pour l’inauguration des Nouvelles Archives Départementales à Bordeaux en février 2011 avec cette communauté éphémère. Robin Renucci, Leslie Kaplan et Boris Cyrulnik nous rejoindront à cette occasion. De plus, FEVER a rassemblé les témoignages et l’analyse de Gérard Boulanger, avocat des parties civiles sur l’affaire Papon et Françoise Talliano des Garets, historienne.
Pour être deux lycéens, doit-on forcément les faire interpréter par de jeunes acteurs ?
Benjamin Dubreuil et Cyril Passadori qui jouent les deux lycéens n’ont pas l’âge des personnages mais ils ont parfaitement compris et intégré l’emprise de l’histoire familiale et collective qui pèsent sur Damien et Pierre. Ils ressentent de façon très juste les deux garçons et ne les jugent pas. Je suis très sensible aux voix, aux corps, à la lumière, à une façon particulière de bouger dans l’espace, de timbrer, d’agir. Marie Christine Aury est la narratrice, elle fait le lien, et ces trois voix au début de la recherche, ainsi que celle de Sarah Piet ont été pour moi le premier espace que je souhaitais rencontrer avec FEVER.
En quoi consiste les installations que vous avez conçues avec la complicité de Karina Ketz ?
Fever est le 5 ème ouvrage d’une série que Leslie a nommé « Depuis Maintenant » et j’ai choisi de concevoir un installation visuelle et sonore autour de fragments de ces 4 autres textes avec une déambulation. C’est une autre forme de transmission, inventer un autre espace qui me permet d’aller au plus près des visiteurs. De plus ce même visiteur de l’installation ne sera pas un spectateur mais bien un acteur de l’installation dont il fera partie de façon éphémère. Afin que la mémoire fasse sens et que le monde questionne, interroge, l’installation se nomme « Leslie depuis maintenant » et je me suis entourée de Karina Ketz avec qui nous avions travaillé sur « Enfant de Harki » sur l’espace sonore. Je suis heureuse que nous puissions nous rejoindre de nouveau sur ce projet d’installation et sur la création sonore de FEVER. Je souhaite aussi remercier toute l’équipe de la Compagnie Acteurs du Monde qui croit en ce projet et lui donne aussi au quotidien toute son humanité et merci à Leslie.
Entretien accordé à Sud-Ouest (Magazine Spirit) Janvier 2011
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